
La raison est simple : elles ont été votées, publiées au Moniteur belge, et font désormais partie du droit positif belge.
Autrement dit, même en cas de chute du gouvernement, ces réformes continueront à s’appliquer, car leur entrée en vigueur ne dépend plus d’un arbitrage politique.
La loi-programme du 18 juillet 2025 (Doc. parl., Chambre, DOC 56 0909/026 et DOC 56 0909/030) constitue la clef de voûte de ces dispositions : un texte dense, mais décisif, qui traduit en actes la première phase du programme fiscal et social 2025-2029.
Le volet social de la loi-programme du 18 juillet 2025 (Doc. parl., Chambre, DOC 56 0909/026 et DOC 56 0909/030) constitue une évolution majeure du droit du travail et de la sécurité sociale.
Ses mesures visent à rééquilibrer le financement des pensions et du chômage, tout en modernisant le cadre de l’emploi pour l’adapter à une économie plus flexible et plus compétitive.
La réforme du régime de chômage, désormais intégrée dans la loi-programme, introduit pour la première fois en Belgique une durée maximale d’indemnisation.
À partir du 1er mars 2026, les allocations de chômage seront octroyées pour une période initiale de 12 mois, prolongeable de 12 mois supplémentaires selon la durée de carrière antérieure. La durée totale ne pourra donc excéder 24 mois.
Plusieurs exceptions ont été prévues pour tenir compte des situations particulières :
Les mesures transitoires sont entrées en vigueur dès le 1er juin 2025, afin d’éviter toute rupture de droit pour les personnes déjà indemnisées.
Que retenir ?
Le droit au chômage devient désormais un droit temporaire et conditionné, orienté vers la réinsertion rapide, sans remettre en cause la protection des publics fragilisés.
La même loi instaure un plafond salarial trimestriel de 85 000 € au-delà duquel aucune cotisation sociale patronale supplémentaire n’est due.
Ce mécanisme, d’application immédiate, vise à réduire le coût du travail pour les fonctions hautement qualifiées et à renforcer l’attractivité de l’emploi en Belgique, en particulier dans les secteurs technologiques et financiers où la concurrence internationale est forte.
Que retenir ?
Ce plafonnement constitue une mesure structurelle d’allégement du coût du travail, susceptible d’améliorer la compétitivité des entreprises à forte valeur ajoutée.
Le régime des heures supplémentaires exonérées et des heures de relance volontaires est prolongé jusqu’au 31 décembre 2025.
Ces dispositifs permettent aux employeurs d’organiser des pics d’activité sans surcoût fiscal ni social, tout en donnant aux travailleurs la possibilité d’augmenter temporairement leur revenu net.
Que retenir ?
Cette prolongation confirme la volonté du législateur de soutenir la relance par le travail, sans rigidifier le marché de l’emploi.
Le texte du 18 juillet 2025 introduit une série de mesures destinées à rendre le système de pension plus soutenable :
Que retenir ?
L’accent est mis sur la responsabilisation des parcours professionnels : encourager la carrière longue, plafonner les régimes sur-indexés et élargir la couverture complémentaire.
Domaine | Mesure | Entrée en vigueur |
Chômage | Limitation à 12 mois (max. 24) avec exceptions ciblées ; mesures transitoires dès juin 2025 | 1er mars 2026 |
Cotisations patronales | Plafond trimestriel fixé à 85 000 € de rémunération | 18 juillet 2025 |
Heures supplémentaires | Prolongation du régime d’exonération et des heures de relance | Jusqu’au 31 décembre 2025 |
Pensions légales | Indexation limitée des pensions élevées (2025-2029) ; non-indexation du plafond Wijninckx ; hausse de la cotisation à 12,5 % ; préparation d’une pension complémentaire obligatoire | 1er juillet 2025 → 2035 |
Le volet fiscal de la loi-programme du 18 juillet 2025 (Doc. parl., Chambre, DOC 56 0909/026 et DOC 56 0909/030) concrétise plusieurs mesures de modernisation du Code des impôts sur les revenus et de la législation TVA.
Certaines propositions initialement évoquées dans le cadre des négociations budgétaires n’ont finalement pas été retenues, mais les réformes adoptées constituent un socle solide et immédiatement applicable à partir des exercices 2025 et 2026.
Le projet initial visait à transformer la déduction RDT en une exonération pure et simple. Cette piste n’a pas été retenue dans la version finale de la loi.
En revanche, deux modifications structurelles ont été adoptées :
Cette nouvelle exigence ne s’applique pas aux petites sociétés au sens de l’article 2 du CIR 92.
Par cohérence, la même condition d’immobilisation financière s’étend à l’exonération du précompte mobilier visée à l’article 264/1 du CIR 92 (régime dit Tate & Lyle).
L’entrée en vigueur est fixée :
Que retenir ?
La loi confirme le régime RDT existant tout en renforçant son assise comptable. Elle distingue désormais plus clairement les participations financières durables des placements de trésorerie.
Les deux régimes historiques de taxation réduite des dividendes — le VVPRbis et la réserve de liquidation — ont été rapprochés pour offrir une plus grande cohérence fiscale.
L’objectif est d’unifier la fiscalité des dividendes pour les petites sociétés, tout en préservant la flexibilité du choix entre les deux dispositifs.
Ces nouvelles règles s’appliquent aux dividendes attribués ou mis en paiement à partir du 29 juillet 2025, date de publication de la loi au Moniteur belge.
Que retenir ?
Le législateur établit une équivalence de traitement entre VVPRbis et réserve de liquidation : un même taux final de 15 % après 3 ans, mais selon deux voies comptables distinctes.
La loi du 18 juillet 2025 étend la définition du dividende afin d’y inclure un dividende fictif lors du transfert de siège d’une société ou lors d’une opération de restructuration (fusion, scission, etc.) entraînant le transfert d’actifs à l’étranger.
Ce dividende fictif est réputé distribué aux actionnaires proportionnellement à leur participation et constitue un revenu mobilier imposable à 30 %, sauf :
Aucune retenue à la source n’est opérée en l’absence de distribution effective : le dividende fictif doit être déclaré par le contribuable. La société transférant les actifs est tenue d’émettre les fiches fiscales correspondantes, sous peine d’une cotisation distincte (article 219 CIR 92).
Par ailleurs, en conformité avec le droit européen, un paiement étalé de l’impôt peut être demandé pour les transferts vers un autre État membre. Enfin, une exonération spécifique évite toute double imposition lors d’une distribution ultérieure issue de la cession de ces actifs.
Cette mesure s’applique à toutes les opérations réalisées à partir du 29 juillet 2025.
Que retenir ?
La Belgique introduit une véritable « exit tax » interne : un impôt de sortie préventif, conçu pour protéger la base imposable nationale tout en restant conforme au droit de l’Union.
Pour les contribuables commettant une première infraction sans intention frauduleuse, la loi remplace désormais l’ancien accroissement automatique de 10 % par un simple avertissement.
Une présomption réfragable de bonne foi est instaurée :
Cette mesure traduit une évolution dans la philosophie du contrôle fiscal : corriger plutôt que sanctionner.
Que retenir ?
Le législateur introduit un principe de proportionnalité : la sanction devient pédagogique pour les erreurs isolées, sans affaiblir la répression de la fraude répétée.
La loi du 18 juillet 2025 institue une nouvelle régularisation permanente des revenus et capitaux non déclarés (DLUquinquies), plus stricte que les précédentes.
Les taux applicables sont désormais :
Ces pénalités concernent tous les contribuables, quelle que soit leur bonne foi, et visent à instaurer un régime durable plutôt qu’une régularisation ponctuelle.
Le formulaire officiel est disponible depuis le 8 août 2025.
Cette DLUquinquies ne s’étend pas aux droits d’enregistrement et de succession, relevant de la compétence régionale ; la Flandre et la Wallonie travaillent déjà à l’adoption de décrets correspondants.
Que retenir ?
La Belgique se dote d’un mécanisme permanent de mise en conformité, plus rigoureux, destiné à solder définitivement les irrégularités fiscales passées.
La loi-programme et ses circulaires d’application (2025/C/46 à 48) introduisent plusieurs ajustements majeurs du régime TVA.
Le taux réduit de 6 % s’applique désormais de manière permanente aux logements livrés après démolition et reconstruction, sous quatre formes :
Les conditions sociales (surface maximale de 175 à 200 m², résidence principale, durée de détention) demeurent inchangées.
Application : 1er juillet 2025.
Le taux réduit de 12 % est supprimé : le taux standard de 21 % s’applique depuis le 29 juillet 2025 à l’ensemble des produits dérivés du charbon (coke, lignite, combustibles solides).
Les travaux de rénovation de logements privés de plus de 10 ans et les livraisons après démolition/reconstruction n’ouvrent plus droit au taux réduit de 6 % lorsqu’ils incluent la fourniture et l’installation de chaudières au gaz, au mazout ou au charbon.
Entrée en vigueur : 1er juillet 2025 (livraisons) et 29 juillet 2025 (rénovations).
Que retenir ?
La TVA devient un levier environnemental : incitation à la construction durable, pénalisation des énergies fossiles et clarification du cadre des travaux de logement.
Afin de stimuler la présence des fonds d’investissement en Belgique, la loi du 18 juillet 2025 instaure un régime fiscal distinct pour les carried interest.
Ces revenus, perçus par les gestionnaires de fonds, sont soumis à un taux maximal de 30 % sans effet rétroactif sur les plans existants.
Que retenir ?
La Belgique cherche à se positionner comme un centre d’expertise financière compétitif, tout en garantissant la stabilité des régimes antérieurs.
Domaine | Mesure clé | Entrée en vigueur |
ISoc | Maintien du seuil RDT à 2,5 M € et exigence d’immobilisation financière (sauf petites sociétés) | 1er juillet 2025 / Ex. 2026 |
Dividendes | Harmonisation VVPRbis / réserve de liquidation : délai 3 ans, taux 6,5 % → taux effectif 15 % | 29 juillet 2025 |
Exit tax | Dividende fictif sur transfert de siège ; imposition 30 % (avec exonérations) | 29 juillet 2025 |
Sanctions fiscales | Suppression de l’accroissement de 10 % pour première infraction ; présomption de bonne foi | Ex. 2025 |
Régularisation | DLUquinquies permanente (30 % / 45 %) | 8 août 2025 |
TVA | Démolition-reconstruction à 6 % ; exclusion chauffage fossile ; suppression 12 % charbon | 1er / 29 juillet 2025 |
Carried interest | Régime spécifique à 30 % pour gestionnaires de fonds | Ex. 2025 |
Parallèlement, d’autres dispositifs souvent évoqués dans le débat public n’ont, à ce jour, aucune valeur légale. Ils figurent uniquement dans les accords budgétaires ou les (avant)-projets de textes. Leur adoption reste hypothétique.
L’incapacité du gouvernement à adopter le budget pluriannuel 2026-2029 crée une incertitude institutionnelle majeure. En cas de chute du gouvernement, la Belgique entrerait dans un régime d’affaires courantes, ce qui bloquerait :
Dans ce scénario, seuls les textes publiés au Moniteur belge — dont la loi-programme du 18 juillet 2025 — continueraient à produire effet. Les mesures non adoptées tomberaient purement et simplement.
Que retenir ?
Les entreprises et les indépendants doivent fonder leurs décisions sur le droit existant, non sur les annonces politiques. Les textes adoptés demeurent applicables, mais toute nouvelle réforme dépendra d’un hypothétique accord politique post-Arizona.
La fiscalité belge se transforme, lentement mais sûrement.
Au-delà des tensions politiques, la loi-programme du 18 juillet 2025 s’impose désormais comme un texte de stabilité. Ses mesures constituent la base du droit applicable, que tout gouvernement devra désormais assumer.
Dans cette période d’incertitude, les entrepreneurs, dirigeants et indépendants doivent se fonder sur les textes publiés, non sur les discours politiques.
Chez Deg & Partners, nous analysons chaque réforme à la lumière de sa portée réelle — votée, publiée, applicable — pour aider nos clients à prendre des décisions en connaissance de cause.
Ensemble, nous transformons la complexité en clarté.