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Facturation électronique via Peppol: quelles obligations pour les médecins et dentistes à l’horizon 2026 ?

La Belgique vit une profonde transformation numérique de ses processus comptables. À compter du 1er janvier 2026, toutes les entreprises belges assujetties à la TVA devront émettre et recevoir leurs factures au format électronique structuré, via le réseau sécurisé Peppol.

Cette réforme, issue du droit européen et déjà en vigueur pour les marchés publics dépassant 3 000 €, soulève de nombreuses questions pour les professions médicales, en particulier les médecins et dentistes. Sont-ils concernés ? Si oui, dans quelle mesure ? La réponse nécessite une analyse fine du cadre TVA applicable aux prestations médicales, souvent partagées entre exonération et assujettissement.


1. Le cadre légal de la facturation électronique

La facturation électronique structurée n’est pas un simple envoi de fichier PDF. Elle suppose l’utilisation d’un format UBL (Universal Business Language), basé sur XML, qui encode chaque donnée (montant, numéro de TVA, date) et la transmet via un réseau sécurisé[1].

En Belgique, ce réseau est Peppol (Pan-European Public Procurement On-Line), plateforme déjà obligatoire pour certaines factures adressées aux pouvoirs publics. L’obligation légale découle de la loi du 22 décembre 2023 portant des dispositions fiscales diverses[2], qui impose ce format pour toutes les transactions B2B à partir du 1er janvier 2026.

En pratique, cela signifie que :

  • toute entreprise assujettie à la TVA devra être affiliée à Peppol pour pouvoir recevoir et émettre des factures électroniques structurées ;
  • l’envoi d’un PDF ou d’un document Word ne suffira plus.

En synthèse : la réforme ne vise pas la simple dématérialisation mais la structuration et l’automatisation complète de la facture.


2. Les activités médicales et dentaires : une exonération TVA… mais pas toujours

Le régime de la TVA applicable aux professions de santé constitue un point central. En Belgique, les prestations de soins à caractère thérapeutique sont exonérées de TVA (article 44, §1er, 1° du Code TVA)[3]. C’est le cas, par exemple, des consultations médicales, des soins dentaires classiques ou des actes de médecine préventive.

Cette exonération entraîne une conséquence directe : ces opérations échappent à l’obligation de facturation électronique B2B, puisque la réforme vise les transactions soumises à la TVA.

Toutefois, certaines prestations ne relèvent pas de la finalité thérapeutique et sont donc assujetties :

  • expertises médicales pour assurances (évaluation d’un dommage corporel, d’une invalidité),
  • analyses ou prélèvements à la demande d’une autorité (police, justice),
  • interventions esthétiques purement non médicales.

Ces prestations constituent des livraisons de services taxables et tombent dans le champ de la réforme lorsqu’elles sont facturées dans un contexte B2B ou B2G (Business to Government).

En synthèse : l’exonération générale des soins thérapeutiques protège la majorité des actes médicaux, mais certaines prestations accessoires déclenchent une obligation de facturation électronique.


3. Les différents cas de figure en pratique

Pour comprendre l’impact concret sur les médecins et dentistes, il convient d’examiner les situations les plus fréquentes :

Situation

Nature de l’opération

Contexte

Obligation Peppol

Soins médicaux ou dentaires classiques (consultation, traitement)

Exonérés de TVA

B2C

Non

Intervention esthétique non thérapeutique

Assujettie à la TVA

B2C (patient paie)

Non

Expertise médicale à la demande d’une compagnie d’assurance

Assujettie à la TVA

B2B (assureur paie)

Oui

Prise de sang à la demande de la police (montant < 3 000 €)

Assujettie à la TVA

B2G

Non (seuil non atteint)

Vente d’un dispositif médical à une entreprise

Assujettie à la TVA

B2B

Oui

Deux observations se dégagent :

  • l’émetteur : si la prestation est payée par un tiers assujetti (assureur, entreprise), le contexte est B2B, rendant la facturation électronique obligatoire ;
  • le seuil B2G : pour les autorités publiques, la facturation électronique est imposée au-delà de 3 000 €, ce qui exclut la majorité des actes médicaux ponctuels.


4. Obligation de réception pour les médecins et dentistes titulaires d’un numéro de TVA

Un point essentiel souvent sous-estimé concerne la réception des factures électroniques.

Dès lors qu’un médecin ou un dentiste détient un numéro de TVA — même s’il reste sous le seuil de franchise de 25 000 €[4] — il doit être en mesure de recevoir des factures Peppol.

Cela signifie que les factures de ses fournisseurs (matériel médical, informatique, maintenance) devront pouvoir être intégrées automatiquement dans sa comptabilité.

L’affiliation à Peppol ne peut donc pas être évitée : elle devient obligatoire pour la réception, même lorsque l’émission reste rare ou inexistante.

En synthèse : l’absence d’émission ne dispense pas de la capacité de réception. C’est une nuance importante pour tous les praticiens disposant d’un numéro de TVA.


5. Implications organisationnelles et rôle de l’expert-comptable

L’intégration de la facturation électronique impose une évaluation du système comptable et de facturation. Les médecins et dentistes doivent :

  • s’enregistrer auprès de Peppol, via un point d’accès agréé (p. ex. Mercurius, Billit, ClearFacts) ;
  • adapter leur logiciel de facturation ou leur ERP pour générer et recevoir des fichiers UBL ;
  • former leur personnel administratif pour éviter les erreurs de traitement.

Le rôle de l’expert-comptable est crucial : il peut identifier les prestations assujetties, calibrer les outils numériques, assurer la conformité TVA et anticiper les contrôles fiscaux.

Chez Deg & Partners, nous avons d’ores et déjà déployé les outils Peppol nécessaires et accompagnons de nombreux cabinets médicaux dans la mise en place de cette transition numérique, afin de sécuriser l’ensemble du processus.


6. Tableau de synthèse et recommandations

Élément clé

Situation pour médecins/dentistes

Recommandations Deg & Partners

Prestations thérapeutiques

Exonérées de TVA – pas de facturation électronique

Confirmer le caractère thérapeutique des actes dans la documentation comptable

Prestations non thérapeutiques B2C

Assujetties mais payées par le patient

Pas d’obligation Peppol – conserver une trace claire du mode de paiement

Prestations non thérapeutiques B2B (ex. expertise assurance)

Assujetties de plein droit

Émettre une facture UBL via Peppol dès 2026

Facturation aux autorités publiques < 3 000 €

Assujetties

Pas d’obligation Peppol, sauf dépassement du seuil

Réception de factures fournisseurs

Obligatoire si numéro de TVA, même sous franchise

S’affilier à Peppol et tester le flux de réception avant fin 2025


7. Recommandations pratiques

  1. Cartographier vos prestations pour distinguer les actes exonérés, assujettis B2C et B2B.
  2. Vérifier votre statut TVA : la possession d’un numéro, même sous franchise, déclenche l’obligation de réception.
  3. S’enregistrer sur Peppol et choisir un point d’accès certifié (Mercurius, Billit, ClearFacts…).
  4. Mettre à jour vos logiciels de facturation et de comptabilité pour générer et intégrer des fichiers UBL/XML.
  5. Collaborer avec votre expert-comptable pour sécuriser le paramétrage et anticiper les contrôles.


8. Conclusion

La réforme belge de la facturation électronique s’inscrit dans une dynamique européenne de transparence et d’automatisation. Pour les médecins et dentistes, l’impact dépend essentiellement du caractère TVA de leurs prestations.

La majorité des soins thérapeutiques restent hors champ, mais toute activité assujettie et payée par une entreprise ou une assurance déclenchera une obligation Peppol dès 2026.

Enfin, la réception des factures électroniques est incontournable pour tout praticien disposant d’un numéro de TVA, même sous franchise.

Chez Deg & Partners, nous nous engageons à accompagner le secteur médical dans cette mutation, en fournissant des solutions techniques certifiées et un conseil fiscal adapté. Ensemble, nous sécurisons votre conformité et transformons une contrainte réglementaire en levier de modernisation.


Références

[1] SPF Finances, efacture.belgium.be, guide technique UBL et Peppol.
[2] Loi du 22 décembre 2023 portant des dispositions fiscales diverses, M.B., 29 décembre 2023.
[3] Code TVA, art. 44, §1er, 1°, exonération des prestations de soins à la personne.
[4] Code TVA, art. 56bis, régime de la franchise pour les petites entreprises (chiffre d’affaires ≤ 25 000 €).

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