TVA sur les travaux immobiliers et le régime cocontractant : que faut-il savoir?

Le régime de "TVA à acquitter par le cocontractant", aussi appelé autoliquidation, est une mesure spécifique applicable aux travaux immobiliers réalisés pour des assujettis à la TVA en Belgique. Il transfère l'obligation de payer la TVA du prestataire de services au client, sous certaines conditions. Ce système présente des enjeux importants tant pour les prestataires que pour les preneurs de service et doit être appliqué avec rigueur pour éviter les sanctions fiscales.


1. Qu'est-ce que le régime cocontractant en matière de TVA et quel est son enjeu ?

Le régime cocontractant repose sur le principe d'autoliquidation :

  • Le prestataire de services ne facture pas la TVA.
  • Le preneur du service déclare et acquitte lui-même la TVA due.

L'enjeu principal est d'éviter la fraude fiscale, notamment en prévenant la disparition de certaines entreprises sans que la TVA n'ait été reversée au Trésor public. Ce système permet également d'éviter des avances de TVA pour les prestataires.

Base légale : Arrêt royal n° 1, article 20.


2. Qui est concerné par ce régime et quelles en sont les limites ?

Le régime cocontractant s'applique lorsque :

  • Les travaux effectués sont des travaux immobiliers ou assimilés.
  • Le client est un assujetti à la TVA tenu au dépôt de déclarations périodiques.

Exceptions et limites :

  • Si le client est une personne physique utilisant l'immeuble à des fins privées, l'autoliquidation ne s'applique pas (Déc. E.T. 122.360, 20.03.2012).
  • Si le client est une personne morale non assujettie (ex. : asbl non identifiée à la TVA), le régime ne s'applique pas.
  • Un assujetti partiel (ex. : hôpital, banque) doit appliquer l'autoliquidation même pour ses activités exonérées.


3. Quelles sont les opérations concernées et assimilées ?

Les travaux immobiliers incluent :

  • Construction, transformation, entretien, réparation, démolition.
  • Installation électrique, chauffage, sanitaire.
  • Revêtement de sols, murs, toiture.
  • Pose de cuisines équipées fixées à l'immeuble.

Sont également concernés :

  • Mise à disposition de personnel pour des travaux immobiliers.
  • Fourniture et placement de béton préparé.
  • Construction de stations d'épuration.


4. Quelles sont les obligations de forme ?

Facturation :

  • La facture ne mentionne ni le taux ni le montant de la TVA.
  • Elle doit contenir la mention "autoliquidation".

Déclaration TVA :

  • Le prestataire déclare l'opération en grille 45.
  • Le preneur la déclare en grilles 81, 82 ou 83, et en grille 87 pour le montant taxable.
  • Il calcule et paie la TVA en grille 56, puis la déduit en grille 59 si déductible.


5. Quelles sont les particularités du taux de TVA à 6 % ?

L'autoliquidation concerne le paiement de la TVA, pas son taux. Ainsi, le taux applicable dépend des conditions normales, notamment :

  • 6 % pour les travaux immobiliers sur une habitation de plus de 10 ans destinée à un usage privé principal.
  • 21 % dans les autres cas.


6. Que se passe-t-il en cas d'erreur dans l'application du régime ?

Si le prestataire facture par erreur la TVA :

  • Le preneur ne peut pas la déduire (facture irrégulière).
  • Une amende et des intérêts peuvent être appliqués.

Si le régime cocontractant est appliqué à tort :

  • L'administration fiscale peut exiger du prestataire le paiement de la TVA non facturée.
  • Le preneur risque de devoir régulariser la situation avec pénalités.


7. Exemple illustratif

Prenons l'exemple d'une entreprise de construction qui réalise des travaux de rénovation dans un magasin appartenant à une société assujettie à la TVA :

  • L'entrepreneur émet une facture avec la mention "autoliquidation", sans mentionner de TVA.
  • La société déclare l'opération en grille 81 et calcule la TVA en grille 56.
  • Si les travaux avaient été effectués chez un particulier, la facture aurait inclus une TVA à 6 % ou 21 %.


Conseils et recommandations

  1. Vérifiez l'identité du client avant de facturer (assujetti TVA ou non).
  2. Ajoutez la mention obligatoire "autoliquidation" sur les factures.
  3. Contrôlez la TVA déclarée dans la bonne grille.
  4. Soyez vigilant sur les erreurs : toute irrégularité peut entraîner des sanctions.
  5. En cas de doute, consultez un expert fiscal ou l'administration TVA.


Sources légales : AR n° 1, art. 20 ; Déc. E.T. 122.360 ; Code TVA ; jurisprudence pertinente.

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