Qu'est qu'un forfait fiscal en Belgique, et comment puis-je l'utiliser jusque 2028?

Le forfait fiscal en Belgique est un régime permettant à certaines professions d’établir leur base imposable sur une estimation forfaitaire de leurs bénéfices, plutôt que sur les bénéfices réels. Cette option, bien que limitée dans le temps (disparition prévue en 2028), reste accessible à certaines professions sous conditions strictes. Cet article explore le cadre légal, les principes et les situations où le forfait peut être refusé ou maintenu, en s’appuyant sur la jurisprudence récente.


1. Qu’est-ce que le forfait fiscal ?

Le forfait fiscal permet à certaines professions indépendantes (bouchers, boulangers, commerçants de détail, etc.) de déclarer leurs bénéfices sur une base forfaitaire. Les taux sont déterminés annuellement par l’administration fiscale.

Base légale : Article 342 du Code des Impôts sur les Revenus (CIR) régit les méthodes de détermination des revenus, y compris le recours au forfait.


2. Quelles sont les professions éligibles au forfait fiscal ?

Tant en matière d’impôts sur les revenus (ISR) qu’en matière de TVA, les professions éligibles au régime forfaitaire sont spécifiquement listées par l’administration fiscale :

  • Bouchers et charcutiers
  • Boulangers et boulangers-pâtissiers
  • Cafetiers
  • Coiffeurs hommes, dames, et mixtes
  • Cordonniers
  • Crémiers et laitiers ambulants
  • Détaillants en alimentation générale
  • Exploitants de friteries
  • Forains
  • Glaciers
  • Marchands de journaux
  • Marchands de textiles et d’articles en cuir
  • Pharmaciens


3. Qui peut encore bénéficier du forfait fiscal ?

Vous pouvez recourir au forfait fiscal si :

  • Vous étiez déjà actif comme indépendant avant le 1er janvier 2022.
  • Votre activité est reprise dans les catégories pour lesquelles des taux forfaitaires existent.
  • Vous respectez les limites et conditions définies par l’administration fiscale.

Après le 1er janvier 2028, le système sera supprimé pour tous.


4. Régime forfaitaire TVA : à qui s'adresse le régime forfaitaire TVA ?

Pour pouvoir bénéficier du régime forfaitaire TVA, vous devez remplir simultanément 4 conditions.

En outre, le régime ne peut pas s'appliquer si vous utilisez un système de caisse enregistreuse.

Secteur d'activité

Le régime forfaitaire s’applique aux secteurs définis (voir ci-dessus)

Forme d'entreprise

Seules les entreprises personnes physiques peuvent bénéficier du régime forfaitaire.

Nature des opérations effectuées

Le régime forfaitaire est applicable seulement si vous devez délivrer des factures (ou des documents) pour maximum 25 %du montant de vos opérations.

Dans certains cas, ce maximum de 25 % peut être augmenté à 40 %.

Chiffre d'affaires maximum

Pour pouvoir bénéficier du régime forfaitaire, vous devez avoir réalisé, au cours de l’année précédente, un chiffre d’affaires inférieur à 750.000 euros (hors TVA).

Voir aussi : Table des matières - Règlementation forfaitaire en matière de TVA

Si vous ne remplissez plus les conditions, vous passez au régime normal de la TVA et devez rentrer une déclaration modificative d’une identification à la TVA (formulaire e604B).

Le nouveau régime s’applique à partir du premier jour du trimestre civil qui suit le trimestre au cours duquel la situation a changé.

Si vous êtes soumis au régime forfaitaire, vous devez tenir les documents suivants :

  • facturier d’entrée
  • facturier de sortie (le cas échéant)
  • journal de recettes (le cas échéant)
  • relevé des bénéfices supplémentaires résultant de conditions d’achat particulières
  • feuille de calcul


5. Quels sont les principes encadrant l’application du forfait ?

  • Choix annuel : L’option pour le forfait n’est pas permanente ; vous pouvez décider chaque année de l’appliquer ou non.
  • Pas de droit automatique : L’administration fiscale peut refuser le forfait si elle prouve que vos bénéfices réels dépassent significativement le montant forfaitaire déclaré (Art. 342 CIR).


6. Dans quels cas le fisc peut-il refuser le forfait ?

Le fisc peut refuser l’application du forfait s’il prouve que vos bénéfices réels sont sensiblement plus élevés. Cela peut être établi par des moyens de preuve variés, y compris :

  • Analyses des recettes réelles via les extraits bancaires.
  • Contrôles des systèmes de caisse enregistreuse.
  • Comparaison avec des indicateurs sectoriels.

Exemple jurisprudentiel (Cour d’Anvers, 05.03.2019) :

Un magasin de chaussures utilisant le forfait depuis des années a vu son forfait refusé après un contrôle révélant des recettes supérieures grâce à un système de caisse électronique.


7. Comment se défendre en cas de refus ?

Si le fisc refuse le forfait :

  1. Vérifiez les preuves : Assurez-vous que les preuves avancées par le fisc ne reposent pas sur des erreurs, des présomptions ou des calculs inexacts.
  2. Contestez la significativité : Si vos bénéfices réels ne dépassent pas substantiellement le forfait, le refus pourrait être abusif.

Exemple jurisprudentiel (Tribunal de Gand, 17.01.2024) :

Un détaillant a contesté le refus en prouvant que des liquidités supposées non déclarées provenaient de la vente d’actions et non de recettes professionnelles. Le tribunal a estimé que les écarts détectés (moins de 5 %) n’étaient pas significatifs.


8. Quels sont les risques d’une mauvaise utilisation du forfait ?

  • Redressement fiscal : Si le fisc prouve un écart substantiel, vous serez imposé sur vos bénéfices réels, avec des intérêts de retard et des amendes éventuelles.
  • Poursuites judiciaires : Dans les cas graves de fraude ou d’omission, des sanctions pénales pourraient s’appliquer.


9. Comment maximiser vos chances de conserver le forfait avec votre expert-comptable ?

  1. Conservez une comptabilité rigoureuse : Même sous forfait, des preuves documentées de vos recettes et dépenses peuvent éviter des litiges. Un forfait ne vous immunise pas définitivement.
  2. Analysez les taux sectoriels : Assurez-vous que vos recettes correspondent aux normes de votre secteur. Ne pensez être plus malin que la majorité de vos collègues sectoriels.
  3. Préparez une défense solide : En cas de contrôle, démontrez que vos bénéfices réels ne dépassent pas sensiblement le forfait. Ne lâchez pas à la bride si vous disposez de base réelle.

Exemple illustratif

Situation :

Un boulanger, actif depuis 2015, déclare ses revenus sous forfait. En 2024, un contrôle fiscal révèle que ses recettes bancaires sont 20 % supérieures aux recettes forfaitaires.

  • Fisc : Refus du forfait, en prétendant que l’écart est significatif.
  • Boulanger : Prouve que 15 % de l’écart provient d’un dépôt personnel (vente d’un véhicule). L’écart réel sur les recettes professionnelles tombe à 5 %, que le fisc ne considère pas comme significatif.

Conclusion : Le boulanger conserve le bénéfice du forfait.


Conseils et Recommandations

1. Anticipez les contrôles :

  • Effectuez régulièrement une analyse des recettes et des taux forfaitaires.
  • Identifiez et documentez toutes les recettes non professionnelles.

2. Restez informé des évolutions légales :

  • Consultez les manuels des taux forfaitaires publiés annuellement par le fisc.
  • Adaptez votre déclaration en fonction des seuils actualisés.

3. Collaborez avec un expert-comptable :

  • Le professionnel peut optimiser vos déclarations et vous assister en cas de litige, mais vous devez l'y aider, car il s'agir bien d'une relation bilatérale et l'expert-comptable ne peut qu'exprimer proprement votre réalité!

4. Soyez vigilant après 2028 :

  • Préparez-vous à une transition vers la déclaration sur bénéfices réels.


Conclusion

Le forfait fiscal reste un outil utile pour simplifier la déclaration des bénéfices, mais son application repose sur des critères stricts et un contrôle rigoureux. Pour éviter les litiges, adoptez une gestion proactive et documentée de vos activités. En cas de désaccord avec le fisc, une contestation bien argumentée, appuyée par des preuves solides, peut faire pencher la balance en votre faveur.


Sources

  • Code des Impôts sur les Revenus (CIR) : Articles 342 et suivants.
  • Jurisprudence : Anvers, 05.03.2019 ; Gand, 17.01.2024.
  • Manuels des taux forfaitaires publiés annuellement par l’administration fiscale.

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