
À partir du 1ᵉʳ janvier 2026, la Wallonie change profondément la manière dont l’électricité est facturée aux ménages et aux petites entreprises raccordés en basse tension. Derrière ce qui ressemble à un simple déplacement des heures creuses, se cache en réalité un nouveau cadre tarifaire qui récompense les consommateurs capables de déplacer une partie de leurs usages vers les moments où le réseau est moins sollicité et l’électricité plus abondante.
Pour les indépendants, les dirigeants d’entreprise et les ménages qui investissent dans la mobilité électrique, le chauffage électrique ou le photovoltaïque, il ne s’agit plus seulement d’« optimiser sa facture », mais de faire des choix structurants (type de tarif, moments de consommation, investissements futurs) qu’il vaut mieux aborder avec une vision chiffrée et pluriannuelle.
Avant d’analyser les changements, il est utile de rappeler les trois niveaux qui composent une facture d’électricité :
Le client wallon dispose, en pratique, de plusieurs formats tarifaires :
À cela peuvent s’ajouter des tarifs dynamiques pour la composante « énergie », proposés par certains fournisseurs, où le prix du kWh varie d’heure en heure en fonction des marchés de gros.²
L’enjeu pour le consommateur n’est donc pas seulement de « subir » ces évolutions, mais de choisir la combinaison tarifaire la plus cohérente avec :
À compter du 1ᵉʳ janvier 2026, la Wallonie introduit une nouvelle répartition des heures pleines et des heures creuses pour les clients en tarif bihoraire :³
Ces plages s’appliquent tous les jours, du lundi au dimanche. Le week-end n’est donc plus intégralement en heures creuses comme auparavant : on y retrouve désormais les mêmes plages pleines / creuses que la semaine.
Selon les simulations reprises par les GRD et la CWaPE, ce nouveau calendrier offre 12 heures creuses supplémentaires par semaine par rapport à l’ancien système, soit 105 heures creuses hebdomadaires au lieu de 93.⁴
Le consommateur n’a aucune démarche à accomplir :
Seule exception : les clients ayant volontairement désactivé la fonction communicante de leur compteur digital seront contactés pour une intervention spécifique.
Pour les clients en monohoraire, rien ne change : le compteur continue à enregistrer une seule tranche de consommation.
L’objectif des nouvelles heures creuses est clair : inciter à consommer l’électricité lorsqu’elle est abondante sur le réseau, notamment grâce au photovoltaïque, et décharger les pointes du matin (7h–11h) et du soir (17h–22h).
Sans tomber dans une discipline militaire, il est déjà utile d’identifier les appareils qu’il est réaliste de déplacer vers les heures creuses :
Exemple :
Un ménage qui déplaçe systématiquement ses lessives, son lave-vaisselle et une partie du chauffage électrique entre 11h et 17h, plutôt qu’entre 18h et 21h, combine deux effets :
En pratique, les fonctions “départ différé” des appareils, l’utilisation de prises programmables ou de prises connectées permettent de programmer sans effort ces déplacements.
Au-delà du bihoraire, la Wallonie introduit au 1ᵉʳ janvier 2026 un tarif de distribution incitatif, dit tarif Impact, accessible aux clients :
Le tarif Impact distingue cinq plages horaires regroupées en trois niveaux de prix :
Selon les documents publiés par la CWaPE, le tarif de distribution en heures PIC peut atteindre cinq fois le tarif ECO, les heures MEDIUM se situant entre les deux.⁷
Le message est limpide : consommer massivement entre 17h et 22h coûtera sensiblement plus cher, alors que les consommations « lissées » sur la nuit et la mi-journée (notamment 11h–17h) seront récompensées.
Sur base des simulations reprises par la CWaPE et certains fournisseurs, on peut résumer l’impact potentiel comme suit :⁸
Autrement dit, Impact n’est pas un “tarif miracle” : il est potentiellement intéressant pour les profils disposant de grosses charges flexibles (VE, pompe à chaleur, boiler) et d’une capacité réelle à les programmer ; il est nettement moins adapté aux ménages peu flexibles ou très concentrés en soirée.
Pour les prosumers bénéficiant encore du compteur qui tourne à l’envers (régime de compensation pour les installations PV antérieures à 2024), la prudence s’impose :
Pour la majorité des prosumers pré-2024, il sera souvent plus prudent, en 2026, de rester sur le nouveau bihoraire, quitte à réévaluer la situation lorsque les produits “miroirs” Eco / Medium / Pic seront clairement identifiés.
Ces mutations tarifaires ne concernent pas que « l’énergie » : elles interfèrent directement avec :
Quelques exemples typiques :
C’est précisément là que l’accompagnement d’un cabinet d’expertise comptable et fiscale prend tout son sens : la question n’est pas seulement “quel tarif est le moins cher cette année ?”, mais “quel choix s’intègre le mieux dans ma stratégie patrimoniale, énergétique et fiscale à 5–10 ans ?”.
Sans entrer dans un guide technique exhaustif, quelques étapes structurantes peuvent être envisagées avec votre conseiller :
Identifier les gros postes de consommation, leurs horaires typiques et la part qui peut être déplacée (pompe à chaleur, VE, boiler, gros électroménager, serveurs…).
1. Synthèse des changements et des enjeux
Élément | Ce qui change en 2026 en Wallonie | Opportunités | Points d’attention |
Bihoraire “classique” | Nouvelles heures creuses : 22h–7h et 11h–17h, tous les jours ; week-end plus entièrement en creux.⁴ | Plus d’heures creuses hebdomadaires ; possibilité de déplacer facilement une partie des usages (lessives, VE, boiler…) en journée. | Nécessité d’adapter les habitudes ; risque de surcoût si la consommation reste concentrée entre 7h–11h et 17h–22h. |
Tarif Impact (distribution) | Nouveau tarif de réseau optionnel, avec 3 niveaux : Eco, Medium, Pic. Heures Eco très bon marché, Pic jusqu’à 5× plus cher.⁷ | Fort levier d’économies pour les profils très flexibles (VE, pompe à chaleur, boiler programmable). | Réservé aux compteurs digitaux communicants ; profil peu flexible = risque de facture plus élevée ; nécessite un minimum de pilotage et de suivi. |
Prosumers PV (compteur qui tourne à l’envers) | Bénéficient du nouveau bihoraire ; Impact possible mais à manier avec prudence tant que les offres “miroir” Eco / Medium / Pic ne sont pas pleinement stabilisées.⁹ | Possibilité d’optimiser l’autoconsommation en ciblant 11h–17h pour les gros usages. | Interaction complexe entre compensation, tarif de réseau et produits commerciaux ; risque de configuration hybride difficile à simuler. |
Tarifs dynamiques (énergie) | Disponibles à Bruxelles et en Wallonie pour certains fournisseurs ; prix du kWh qui varie heure par heure.² | Intéressant pour les profils très équipés (HEMS, VE, pompe à chaleur, batterie) et capables de piloter finement leurs usages. | Incompatible avec la compensation ; nécessite compréhension des marchés de l’énergie, systèmes domotiques et supervision régulière. |
Ménages & indépendants sans gros équipements | Subissent le nouveau bihoraire ; Impact rarement prioritaire si la flexibilité est faible. | Gains possibles via de simples décalages (lave-linge, lave-vaisselle, sèche-linge) et une meilleure visibilité sur la facture. | Ne pas sur-complexifier ; rester sur une formule éprouvée (bihoraire) peut être plus judicieux qu’un tarif incitatif mal exploité. |
Pour les clients particuliers, indépendants et PME, quelques lignes de force peuvent guider les décisions :
Avant de changer de structure tarifaire ou de fournisseur, il est utile de disposer d’une simulation chiffrée, tenant compte de vos habitudes réelles (et pas de comportements théoriques difficiles à tenir).
Le choix d’un tarif ne se résume pas à quelques euros par an : il interagit avec vos investissements énergétiques, vos charges professionnelles déductibles, et la manière dont vous structurez vos flux privés / professionnels. C’est typiquement un sujet à aborder avec votre expert-comptable.
Pour beaucoup de ménages sans VE ni pompe à chaleur, le nouveau bihoraire 2026, combiné à une simple discipline sur les gros appareils, constituera un premier pas raisonnable avant d’envisager un tarif Impact ou dynamique.
Le tarif Impact peut être très attractif pour :
Dans ces cas, une étude de cas avec votre conseiller (profil de charge, investissements, amortissements, fiscalité) permet de sécuriser le choix.
Tant que toutes les offres commerciales ne sont pas clairement alignées sur les plages Eco / Medium / Pic, rester sur le nouveau bihoraire et continuer à optimiser son autoconsommation en journée demeurera, pour beaucoup, la solution la plus robuste.
Sans forcément investir directement dans un HEMS complet, il est déjà possible de :
C
hez Deg & Partners, nous considérons ces évolutions énergétiques comme un prolongement naturel de l’accompagnement comptable et fiscal : chaque kWh déplacé aux bonnes heures, chaque option tarifaire choisie en connaissance de cause, contribue à sécuriser votre budget, votre trésorerie… et la cohérence de vos choix d’investissement.
L’électricité devient un poste stratégique. Vous n’êtes pas obligé de le gérer seul.
¹ CWaPE, « Tarifs de distribution 2026–2029 et introduction du tarif incitatif Impact », documents de consultation et communiqués 2024–2025.
² Ecoconso, « Électricité : comment tirer parti des heures creuses ? », synthèse pédagogique 2025.
³ CWaPE / GRD, informations grand public sur l’évolution du bihoraire en 2026 (heures creuses 22h–7h et 11h–17h).
⁴ ENGIE, « Le réseau wallon en 2026 : nouveaux horaires bihoraires et tarif Impact », fiche explicative 2025.
⁵ ORES et autres GRD, notes techniques sur l’activation à distance des nouvelles plages horaires via impulsions et télécommande des compteurs communicants.
⁶ CWaPE, « Avis sur la tarification incitative Impact (compteurs SMR3) », 2024.
⁷ CWaPE, annexe méthodologique : ratio de prix Eco / Medium / Pic dans la structure du tarif de distribution 2026–2029.
⁸ Simulations de coûts de distribution 2026 pour un ménage moyen publiées par la CWaPE et reprises par la presse économique.
⁹ BeProsumer, communiqués 2025 sur l’impact potentiel du tarif Impact pour les prosumers bénéficiant encore du régime de compensation.