Facturation électronique obligatoire via Peppol: nouvel équilibre entre sécurité juridique et organisation interne

1. Un changement de paradigme : la facture devient un flux structuré

À partir du 1er janvier 2026, toutes les factures entre entreprises belges assujetties à la TVA devront être échangées sous forme électronique structurée via le réseau Peppol¹. Cette obligation, consacrée par l’Arrêté royal du 8 juillet 2025, ne se limite pas à un simple changement de format : elle modifie la manière dont la facture existe juridiquement, circule dans l’entreprise et est contrôlée.

Concrètement, la facture n’est plus un document isolé (papier ou PDF), mais un flux de données normé :

• émis dans un format structuré (XML conforme à la norme européenne EN 16931) ;
• transmis via un réseau sécurisé (Peppol) ;
• intégré directement dans les logiciels comptables et de gestion.

Pour les dirigeants, la question n’est donc plus seulement : « Mon logiciel est-il compatible Peppol ? », mais surtout : « Mon organisation est-elle prête à traiter des factures qui entrent et sortent automatiquement, avec les implications juridiques que cela entraîne ? »

2. Ce que Peppol change réellement sur le plan juridique

Il est utile de distinguer les effets véritablement nouveaux de la réforme, au-delà du discours purement technique.

2.1. Obligation de format et fin de la facture papier/PDF en B2B belge

Entre entreprises assujetties belges, la facture devra :

• être émise sous forme électronique structurée ;
• transiter par Peppol ou une infrastructure techniquement équivalente reconnue ;
• respecter les exigences de contenu déjà prévues par le Code de la TVA et le Code de droit économique².

Corollaire important : une facture papier ou PDF envoyée par e-mail ne répond plus aux exigences légales dans un contexte B2B belge.

Si vous recevez encore, après le 1ᵉʳ janvier 2026, une facture :

• envoyée uniquement par PDF en pièce jointe ;
• ou par courrier postal sans version Peppol,

il est prudent de la refuser explicitement, en mentionnant :

• qu’elle ne respecte pas l’obligation de facturation électronique structurée ;
• et, le cas échéant, les raisons de désaccord matériel (montant, conditions, livraisons, etc.).

2.2. Une meilleure traçabilité : réception et preuve

Le passage par Peppol renforce la traçabilité :

• horodatage de l’envoi et de la réception ;
• identification claire de l’émetteur et du destinataire via leurs identifiants Peppol ;
• réduction des risques de factures « perdues » ou prétendument « non reçues ».

Sur le plan probatoire, cela facilite la démonstration :

• de la date de mise à disposition de la facture ;
• de la réalité de l’envoi vers le bon destinataire.

Cela ne signifie toutefois pas que la facture est acceptée pour autant : la réception technique et l’acceptation juridique demeurent deux étapes distinctes.

3. Ce que Peppol ne change pas : les fondamentaux du droit des obligations

L’un des principaux malentendus tient à la croyance que l’arrivée d’une facture via Peppol lierait automatiquement le client. Il n’en est rien.

3.1. Pas d’acceptation automatique en cas de réception ou d’imputation comptable

Ni la réception via Peppol, ni l’intégration automatique dans la comptabilité ne constituent :

• une reconnaissance de dette ;
• ni un accord sur le montant, la prestation ou les conditions.

Le client conserve :

• le droit de contrôler la facture (quantités, prix, conformité contractuelle) ;
• le droit de la contester dans des délais raisonnables (et idéalement définis dans les conditions générales)³.

Exemple

Une facture Peppol est automatiquement enregistrée dans votre logiciel via un flux intégré. Quelques jours plus tard, votre service logistique constate que les marchandises livrées sont incomplètes. Vous conservez la faculté de contester la facture, pour autant que cette contestation soit notifiée de manière traçable (e-mail, courrier recommandé, procédure interne documentée).

3.2. Paiement et délais : inchangés

La facturation électronique :

• ne modifie pas les modalités de paiement (virement, QR-code, plateforme) ;
• ne remplace pas les accords contractuels (30 jours, 60 jours, etc.) ;
• ne déroge pas aux règles de la loi sur la lutte contre le retard de paiement dans les transactions commerciales⁴.

Une facture Peppol doit donc être payée :

• dans les délais prévus par le contrat ou les conditions générales ;
• ou, à défaut, dans les délais légaux.

3.3. Rappels, mises en demeure et procédures de recouvrement

Le réseau Peppol n’est pas destiné à :

• l’envoi de rappels de paiement ;
• les mises en demeure ;
• la gestion du recouvrement.

Ces actions doivent rester effectuées via :

• e-mails structurés,
• courriers (éventuellement recommandés),
• ou modules spécifiques des logiciels de gestion.

Dans tous les cas, il convient de :

• mentionner la référence de la facture Peppol ;
• rappeler la date de transmission et la date d’échéance ;
• documenter les échanges en vue d’un éventuel litige.

4. Zones de vigilance : conditions générales, fraude et responsabilités

L’obligation Peppol est aussi une invitation à revisiter son cadre contractuel et ses contrôles internes.

4.1. Mettre à jour les conditions générales

Les fournisseurs ont intérêt à :

• préciser que les factures sont désormais établies et transmises via Peppol ;
• définir la date réputée de réception (par exemple, la date d’arrivée dans la boîte Peppol du client) ;
• encadrer les délais de contestation (x jours ouvrables) ;
• préciser le sort d’une facture non contestée dans les délais (présomption d’acceptation, dans le respect du droit économique).

Les clients, quant à eux, devraient :

• intégrer des procédures internes de validation (workflow) ;
• s’assurer que les services opérationnels et financiers soient alignés avec ces nouvelles clauses.

4.2. Fraude : un risque réduit, mais pas supprimé

Peppol réduit certains risques (usurpation d’adresse e-mail, falsification de PDF), mais n’élimine pas la fraude. Des points de contrôle restent indispensables :

• vérification de l’identité des nouveaux fournisseurs ;
• contrôle des coordonnées bancaires (processus de « vendor onboarding ») ;
• vérification des identifiants Peppol utilisés.

Il peut être opportun d’insérer dans les conditions générales :

• une clause d’avertissement contre les changements unilatéraux de coordonnées bancaires reçus par e-mail ;
• une procédure interne (double validation) pour toute modification sensible.

5. Dimension internationale : cohabitation des formats jusqu’en 2030

L’obligation de facturation électronique structurée s’applique, dans un premier temps, entre assujettis belges.

Pour les fournisseurs étrangers :

• une période transitoire est prévue jusqu’au 1ᵉʳ juillet 2030 ;
• ils pourront encore émettre des factures PDF ou papier vers leurs clients belges ;
• parallèlement, plusieurs États membres introduisent des obligations analogues (par exemple, la France à partir du 1ᵉʳ septembre 2026 pour la B2B domestique⁵).

En pratique, les entreprises belges devront donc :

• gérer un double flux : factures Peppol domestiques et factures « classiques » étrangères ;
• veiller à ce que leurs outils comptables puissent agréger ces flux dans un reporting cohérent ;
• anticiper l’évolution future vers une harmonisation européenne plus poussée.

6. De la contrainte à l’opportunité : Peppol intégré à MasteryPro et My.accounting

Là où la réforme peut devenir un véritable levier, c’est lorsqu’elle s’intègre dans une architecture numérique cohérente, plutôt que d’être gérée « à la pièce ». C’est dans cette logique qu’a été conçue la plateforme MasteryPro, au sein de laquelle My.accounting occupe une place centrale.

6.1. My.invoices, My.files, My.track : rationaliser le flux documentaire

En amont de la comptabilité, les modules de l’offre Mastery permettent de structurer le cycle documentaire complet :

• My.invoices :

gère l’émission des factures clients en format Peppol, avec intégration immédiate dans les systèmes comptables ;

• My.files :

centralise la réception, l’archivage et la mise à disposition des documents (factures fournisseurs, annexes contractuelles, bons de commande et de livraison) ;

• My.track :

suit les comptes clients et fournisseurs, les encours, les retards et les relances, en cohérence avec les données issues des factures électroniques.

6.2. My.accounting : le « pont intelligent » entre Peppol et la comptabilité

Le cœur de la valeur ajoutée se situe dans My.accounting, conçu par et pour des experts-comptables. L’outil ne se contente pas de « recevoir » des factures Peppol : il les interprète et les intègre dans votre logique comptable et fiscale :

• contrôle automatisé de la cohérence TVA (régime, codes, mentions obligatoires) ;
• affectation des factures aux bons comptes, centres de coûts et périodes ;
• intégration avec les mécanismes d’automatisation :
• gestion des DNA,
• déduction pour investissement,
• traitement des véhicules et de leurs frais,
• simulations fiscales et pré-calculs d’impôts.

L’effet combiné de Peppol et de My.accounting est double :

• sécuriser juridiquement vos flux de facturation (trace, conformité, auditabilité) ;
• renforcer la qualité du dialogue avec votre expert-comptable, qui accède à des données déjà structurées, contrôlées et documentées.

7. Tableau de synthèse et recommandations

7.1. Tableau récapitulatif

7.2. Recommandations pratiques

Pour tirer pleinement parti de la facturation électronique obligatoire, il est recommandé :

1. D’auditer vos flux de facturation actuels
• cartographier les canaux d’émission et de réception (papier, PDF, Peppol, portails) ;
• identifier les clients/fournisseurs à fort volume à prioriser dans la migration.
2. D’adapter vos conditions générales et vos contrats
• préciser l’utilisation de Peppol comme canal standard ;
• encadrer les délais et modalités de contestation ;
• insérer des clauses antifraude et de vérification des coordonnées bancaires.
3. De formaliser vos procédures internes
• définir des workflows de validation, avec responsabilités claires ;
• documenter les circuits de rappel et mise en demeure ;
• prévoir une procédure spécifique pour les factures non conformes (hors Peppol).
4. D’investir dans une solution intégrée plutôt que dans un “patch” technique
• privilégier une plateforme qui relie facturation, comptabilité et pilotage (MasteryPro) ;
• s’assurer que Peppol soit nativement intégré à la chaîne comptable (My.accounting).
5. De travailler en étroite collaboration avec votre expert-comptable
• valider les choix d’outils et de paramétrage ;
• organiser la répartition des tâches (vous / cabinet) ;
• utiliser les flux Peppol comme base d’un reporting financier plus régulier et plus fiable.

En maîtrisant à la fois le cadre juridique et les outils technologiques, la facturation électronique via Peppol cesse d’être une contrainte pour devenir un levier de gouvernance financière. C’est précisément dans cette articulation entre droit, organisation et technologie que Deg & Partners se positionne à vos côtés. Ensemble, nous transformons la complexité en clarté.