Vous bénéficiez de la dispense partielle de versement du précompte professionnel pour le travail en équipe ? Début 2024, la Cour constitutionnelle a estimé que le fisc pouvait interpréter les règles de manière plus stricte, ce qui pouvait entraîner une exclusion de nombreux systèmes de travail en équipe. Une mesure transitoire, appelée « travail en équipe bis », permet de maintenir en partie la dispense jusqu’à fin 2026.
Une circulaire du fisc, publiée fin juillet 2025, précise toutefois qu’en tant qu’employeur, vous devez choisir chaque mois, pour chaque système de travail en équipe, lequel des deux régimes vous appliquez.
Votre entreprise recourt au travail en équipe ? Vous ne devez donc pas verser au fisc une part du précompte professionnel retenu. Cette dispense s’applique pour les travailleurs qui effectuent un tiers de leur temps de travail en équipe. Le montant auquel vous avez droit ? 22,8 % de la rémunération imposable du travailleur concerné pour le mois en question. Ce pourcentage sera de 25 % en cas de travail en continu.
Pour pouvoir parler de travail en équipe (classique), les conditions suivantes doivent être respectées sur le plan fiscal :
Une prime d’équipe est une condition essentielle pour bénéficier de la dispense (classique ou travail en équipe bis). Si vous ne versez pas de prime à votre équipe du matin, alors que vos équipes du soir en reçoivent une, ce système de travail en équipe ne pourra pas bénéficier de la dispense.
Les termes d’objet et d’ampleur de la deuxième condition suscitent de nombreuses incertitudes. Ils n’ont en effet jamais été définis clairement. Début 2024, la Cour constitutionnelle a estimé que le fisc pouvait interpréter ces conditions de manière plus stricte et autoriser uniquement la dispense pour les entreprises qui respectent cette condition au pied de la lettre. La dispense ne s’applique dès lors pas dans les cas suivants :
Il en résulte une forte diminution du nombre d’employeurs ayant droit à la dispense, car en pratique, l’objet et l’ampleur du travail sont rarement parfaitement identiques.
La lecture littérale de la loi n’a en pratique jamais été appliquée, pas même par les inspecteurs du fisc, qui toléraient généralement de légers écarts entre équipes successives. Cependant, dans un dossier particulier, cette interprétation a donné lieu à une discussion : le contribuable estimait que l’écart restait dans les limites de tolérance, mais l’inspecteur compétent n’était pas d’accord. L’affaire a été portée devant le tribunal, qui a demandé à la Cour constitutionnelle de se prononcer sur l’interprétation stricte de la loi. La Cour constitutionnelle a confirmé une lecture très stricte, encore plus stricte que celle appliquée en pratique jusqu’à présent.
Le fisc se montrera-t-il plus strict dorénavant ? Nous n’en savons rien. Et cette incertitude met mal la sécurité juridique de nombreuses entreprises.
En réponse, le ministre Van Peteghem a mis au point une proposition de loi qui prévoit deux options jusqu’au 31 décembre 2026 : continuer à appliquer les règles actuelles (strictes) ou opter pour une nouvelle variante bis qui vous permet de demander une partie de la dispense partielle si l’ampleur du travail n’est pas identique. La condition d’objet identique est en revanche maintenue.
La proposition de loi définit l’ampleur comme la « production du travail » de l’équipe. Pour le dire simplement : si l’équipe A produit 100 pains et que l’équipe B en produit 80, l’équipe B a effectué un travail de moindre ampleur. Or, bien souvent, le contrôle de la production du travail s’avère plus compliqué que de compter des pains. Dans ce cas, vous pouvez aussi vous baser sur la taille de l’équipe en fonction du nombre de travailleurs, ou même sur le nombre d’heures prestées dans chaque équipe.
Voici un exemple tiré de l’exposé des motifs de la proposition de loi : trois équipes successives effectuent un travail en équipe sur deux jours. Leur production (ou la taille de l’équipe) est la suivante :
Nous commençons par déterminer la dispense maximale : elle s’élève à 22,8 % (25 % en régime continu) des rémunérations imposables des travailleurs qui atteignent la norme du tiers, avec pour limite le total du précompte professionnel dû.
Pour le mois concerné, le travailleur doit avoir presté au moins un tiers de son temps de travail en équipe. Cette norme doit être calculée séparément pour chaque type de dispense. Si un travailleur atteint la norme à la fois pour le régime classique et pour le régime transitoire “travail en équipe bis”, l’employeur doit choisir quel régime appliquer.
Ensuite, nous calculons la différence entre les équipes. Il s’agit de l’écart entre chaque équipe et la plus petite équipe du régime du jour en question :
Puis, nous additionnons ces différences pour calculer l’écart d’ampleur du travail qui se rapporte à la période totale. Dans cet exemple, il s’élève donc à (20+30)/(60+140) = 50/200 = 25 %. Nous devons donc retenir 25 % du montant de la dispense que vous souhaitez appliquer.
Lors de l’introduction de la mesure, le doute demeurait concernant le niveau (par équipe, par section, par entreprise, etc.) utilisé pour calculer ce facteur de correction. Deux éclaircissements ont donc été apportés fin 2024.
Exemple
Nous nous basons sur un facteur de correction de 10 % et une rémunération imposable de 3 500 euros. Le précompte professionnel s’élève 455 euros.
Lors des contrôles, une certaine tolérance est admise. Cela permet à l’employeur d’opter pour le système classique de travail en équipe plutôt que pour la variante « travail en équipe bis ». Jusqu’ici, il n’était pas clair comment cette tolérance devait être calculée, mais la circulaire précise désormais qu’elle ne peut dépasser 10 % par jour.
Nous calculons la différence entre le nombre de membres de la plus grande équipe et celui de la plus petite équipe, puis on divise ce résultat par le nombre de membres de la plus grande équipe. Ce calcul doit être effectué par jour et par système d’équipes.
plus grande équipe – plus petite équipe
plus grande équipe
Si, pour chaque jour ouvrable du mois, la différence reste inférieure à 10 %, le régime du travail en équipe classique peut être appliqué. Les absences liées à la maladie ou à un petit chômage ne sont pas prises en compte dans ce calcul des 10 %.
Grâce à cette proposition de loi, la dispense ne relève plus du « tout ou rien », mais elle tient compte des écarts d’ampleur. Jusqu’à la fin 2026, vous pouvez donc encore bénéficier de la dispense partielle pour des équipes inégales. La dispense applicable est alors calculée au prorata. Cette variante est applicable avec effet rétroactif au 1er janvier 2021. Vous pouvez ainsi encore récupérer les éventuelles dispenses non appliquées ou refusées.
Bart Hollebekkers
Consultant Tax & Legal