Je n’ai pas de compétences en économie sociale, mais je me souviens qu’il y a quelques années, la Présidente du Forem m’avait confié que le chômage de longue durée n’était pas un problème de travail, mais le reflet de décrochages multiples : citoyen, civil, fiscal, scolaire, alimentaire, etc.
Lorsque je vois que le gouvernement veut absolument écarter de la protection sociale un grand nombre de personnes, probablement en situation de déclassement (qui se mêlent à un certain nombre d’individus tirant déloyalement profit de la sécurité sociale), je me demande si les postulats de remise au travail n’ont pas été élaborés trop rapidement.
Partir de l’idée qu’un tiers des chômeurs de longue durée va revenir sur le marché de l’emploi est un postulat louable, mais probablement erroné (ce que conforme, de manière confidentielle, les patrons), sans que cela entache la nécessité absolue de promouvoir le travail. Ce postulat relève de la même fiction d’origine américaine selon laquelle les personnes et les emplois sont substituables, tout comme les compétences, et qu’un chômeur peut facilement combler les vides des secteurs en pénurie.
D’ailleurs, chaque jour, des économistes comme @Philippe Defeyt, dont les compétences ne sont plus à démontrer, dénoncent les effets indirects, et souvent délétères, des mesures annoncées.
À nouveau, la Belgique doit impérativement évoluer, mais il existe des murs mitoyens à l’État social, dont l’indexation des salaires et allocations, la protection sociale, l’accès à une protection médicale, la solidarité intergénérationnelle des retraites et le système éducatif font partie. Si l’on fait trop pivoter ces murs mitoyens, c’est l’écroulement.
Je crains que ces mesures ne deviennent impopulaires, même chez ceux qui ne sont pas directement visés, car ils réalisent que leur propre filet de sécurité sociale pourrait un jour être altéré. À ces personnes, on avait promis des baisses d’impôts, alors que chaque jour en démontre l’impossibilité.
Et j’entends autour de moi une sourde colère, certes de bas bruit, qui, à mon grand étonnement, se diffuse, comme si certains comprenaient que les lendemains chantants des élections de juin 2024... déchantaient.
Je dis : faisons très attention à ne pas casser la maison Belgique. Nous la devons à nos aïeux qui l’ont reconstruite après 1945. Ils la voulait inclusive, solidaire et alignée.
Il faut éviter l’écroulement d’un modèle solidaire.